Visiter l’île d’Islay et ses distilleries
Visiter l’île d’Islay et ses distilleries

Islay : l’île aux alambics

Si le confinement a eu un aspect positif, c’est celui de nous faire ralentir, certes contraints et forcés, mais force est de constater que cet arrêt sur image nous a appris à quel point faire une pause était précieux. Apprendre à prendre son temps et apprécier l’inertie, c’est certainement l'une des leçons que nous aura donné cette pandémie mondiale.

Nous essayons encore d’apprivoiser cette vie au ralenti dans nos grandes villes, mais s’il y a bien un endroit où l’on chérit ce mode de vie depuis déjà bien longtemps, c’est la petite île écossaise d’Islay, au large de la côte ouest du pays. Au sein de la somptueuse archipel des Hébrides, Islay possède néanmoins une aura à part, qui lui permet d’attirer de nombreux touristes tout au long de l’année.

Certains viennent apprécier son air frais, parcourir ses routes en vélo ou encore s’adonner aux plaisirs de la randonnée pédestre, mais son véritable attrait se situe ailleurs : dans ses délicieux whiskies.

La petite île d’à peine plus de 3000 habitants accueille en effet sur son sol 9 distilleries de whisky, parmi les plus iconiques du pays. On peut évidemment se permettre de toutes les citer, puisqu’aucune ne mérite d’être oublié dans cet article : Kilchoman la fermière, Bowmore la belle, LaphroaigArdbeg la survivante, Lagavulin la légendaire, Bruichladdich l’audacieuse, BunnahabhainCaol Ila ou encore la petite nouvelle : Ardnahoe.

Ce qui fait également la spécificité des Single Malts d’Islay et leur renommée dans le monde, c’est la tourbe ! Cet ingrédient miracle, passé de simple combustible pas cher utilisé pour se chauffer ou encore cuisiner il y a de nombreuses années, à véritable « or végétal » de l’île offrant leur profil si particulier aux jus d’Islay.

La majorité (attention, pas tous néanmoins !) des whiskies produits sur l’île possèdent en effet ce profil tourbé significatif de la région, qui fait depuis longtemps tourner les têtes de nombreux amoureux de single malt ! Comment obtient-on un whisky tourbé ? Tout simplement en faisant sécher l’orge, préalablement maltée, au feu de tourbe. Cette étape permet à la céréale de se concentrer en phénols et donc en arômes fumés/tourbés avant de passer par le processus de brassage, de fermentation, de distillation et de vieillissement.

Et si vous n’en avez pas encore assez avec les 9 distilleries que compte Islay, sachez qu’une petite traversée supplémentaire de quelques minutes en ferry vous permettra d’en visiter une dixième, et pas des moindres : Jura, qui comme son nom l’indique, se situe sur la petite île de Jura au large d’Islay (on vous conseille évidemment d’en profiter pour aller parcourir les magnifiques Paps of Jura et prendre un peu de hauteur !).

Se rendre sur Islay est clairement un « must-do » sur n’importe quel bucket list d’amateur de whisky, mais avant de vous y rendre, il y a évidemment quelques petites choses à savoir !

1) Quand s’y rendre ?

Chaque saison apporte avec elle son atmosphère sur Islay mais attention néanmoins, vous risquez par exemple de vous heurter à des hordes de touristes durant la période estivale de Mai à Septembre et plus particulièrement au mois de Mai lors du fameux festival de l’île (Feis Ile).

Si vous appréciez l’ambiance festive, que vous souhaitez mettre la main sur des bouteilles rares (chaque distillerie de l’île sort une édition limitée spéciale cette semaine là, des éditions particulièrement prisées qui font l’objet de nombre de spéculations et le bonheur de certains revendeurs…), je ne peux que vous conseiller néanmoins de découvrir l’ambiance unique de ce festival qui met à l’honneur l’or liquide d’Islay. Chaque jour de la semaine est ainsi ponctué par des journées spéciales « open days » dans les différentes distilleries et de nombreuses activités sur l’île (concerts etc.). Un open day à ne pas manquer si vous êtes dans le coin, celui de la distillerie Bruichladdich qui sort toujours le grand jeu en matière de dégustation et de célébrations !

Si vous aspirez à plus de tranquillité, l’idéal reste de visiter Islay hors saison touristique, c’est-à-dire plutôt aux mois de Mars, Avril ou Octobre. Les températures y sont encore clémentes, les distilleries ouvertes, et les quelques hôtels que compte l’île sont évidemment moins pris d’assaut.


S’il y a néanmoins bien une période à éviter, c’est celle des fêtes de fin d’année, puisque la plupart des distilleries opèrent leur fermeture annuelle à cette période. Renseignez-vous bien avant de prévoir votre voyae pour éviter les déceptions.

2) On reste combien de temps ?

En ce qui concerne la durée de votre séjour sur l’île, tout dépend de vos aspirations et du nombre de distilleries que vous souhaitez visiter : un détour sur Islay ne peut pas se faire en une seule journée, il faut minimum prévoir deux jours pleins. On vous conseille 3 jours pour véritablement vous imprégner de l’ambiance unique de l’île, mais idéalement entre 3 et 5 jours serait une durée idéale pour profiter de tout ce que l’île a à offrir, et réserver une demi-journée à la visite de la voisine Jura, qui en vaut vraiment la chandelle !

3) Comment s’y rendre ?


Deux possibilités pour venir sur l’île s’offrent à vous : la voie des mers ou la voie des airs ! Malgré sa petite taille, Islay possède en effet un petit aéroport et vous pourrez embarquer dans un vol direct depuis Glasgow grâce à la compagnie Loganair.

Si vous n’êtes pas pressés par le temps et que vous souhaitez en profiter pour voir du pays, on vous encourage vivement à choisir l’option route + ferry, au départ de Glasgow ou Edimbourg (comptez une journée de route et profitez-en pour vous arrêter le long du chemin). Vous ne serez certainement pas déçus par la beauté du paysage traversé. Alors oui, il n’y a pas d’autoroute jusqu’au petit port de Kennacraig (arrivée sur Islay via Port Askaig ou Port Ellen) et c’est tant mieux, on vous a dit qu’on allait vous apprendre à prendre votre temps !

Embarquez ensuite pour une durée de quelques heures (selon la météo, qui parfois peut s’avérer capricieuse dans le coin, renseignez-vous en amont pour vérifier que votre ferry est bien maintenu !) dans les Hébrides. Les traversées sont opérées par la société CalMac Ferries, et vous trouverez même de quoi vous restaurez dans le bâteau. Comme pour tout en Ecosse, on vous conseille dans la mesure du possible de réserver vos billets à l’avance pour éviter le stress.
 
4) Où dormir ?


Tout d’abord un conseil : réservez tôt, voire même très très tôt si vous souhaitez profiter du festival (minimum un an à l’avance). Islay compte très peu d’hôtels et de maison d’hôtes. Voici néanmoins quelques hébergements testés et approuvés :
 
- ISLAY PODS : de charmants petits chalets de bois tout équipés (barbecue sur la terrasse inclus) situés en bord de mer sur la côte entre les distilleries de Laphroaig et Lagavulin. Peu onéreux, charmant, atypique et confortable !

- PORT CHARLOTTE HOTEL
 : une véritable institution sur l’île, on y dort bien, on y mange bien et les propriétaires sont d’une immense gentillesse (à l’image de toute la population de l’île). L’hotel se situe dans la petite bourgade de Port Charlotte non loin de la distillerie Bruichladdich.

- ISLAY HOUSE
 : un écrin de confort, d’authenticité et de luxe dans cette grande bâtisse historique qui a récemment été rénovée pour devenir le véritable premier « boutique hotel » de charme de l’île.
Pour les plus aventuriers d’entre-vous, l’option Van aménagé ou camping car est également reine sur Islay, tant il y a de superbes spots pour se garer passer la nuit après un dîner devant le coucher du soleil (accompagné de quelques drams et fruits de mers locaux).

5) Outre les distilleries, que voir/faire sur l’île ?

Si l’île est principalement célèbre pour ses distilleries en activité, elle abrite également une belle endormie (qui devrait néanmoins renaître de ses cendres bientôt) : l’ancienne distillerie de Port Ellen, dont vous pourrez encore admirer l’imposante enseigne en grandes lettres (typiques des distilleries de l’île) grâce à une balade le long de la plage. Aujourd’hui la légendaire distillerie (fermée au début des années 1980) est utilisée en tant que malterie par son propriétaire le groupe Diageo, mais un projet de réhabilitation est en cours.

Bien qu’on aime beaucoup le whisky, parfois une petite pause s’impose, et l’île offre de nombreuses activités : randonnées, balades à vélo, ornithologie, dégustation de fruits de mer et même de bières artisanales locales (Islay Ales) !

Quelques points d’intérêts à visiter :


- la plage de Machir (ça vous rappelle certainement un de vos whiskies préférés non ? Oui, c’est bien du délicieux Kilchoman Machir Bay dont on parle et si ce n’est pas déjà fait on vous conseille vivement de le goûter !)

- L’American Monument

- Le château (enfin les ruines du château…) de Dunyvaig

- La réserve du Loch Gruinart pour observer de magnifiques oiseaux dans un sublime environnement sauvage
 
6 ) Quelques whiskies à déguster avant de partir pour se mette dans l’ambiance :

Lagavulin 8 et Lagavulin Distillers Edition : Outre le classique et indémodable Lagavulin 16, la distillerie propose de nombreuses autres références tout aussi bien fichues. Voici donc deux d’entre-elles à découvrir de toute urgence (et ne vous fiez surtout pas au compte d’âge sur la bouteille, parfois la qualité n’attend pas le nombre des années et ce Lagavulin 8 en est la preuve liquide) !

- Port Charlotte 10 et Bruichladdich Classic Laddie :
On commence d’abord par le Classic Laddie dans son originale bouteille bleu turquoise, qui vous fera oublier que Islay = tourbe, puis on enchaîne sur le Port Charlotte 10, un must-have d’une très grande maîtrise. Bruichladdich s’emploie depuis quelques années à faire bouger les codes de l’industrie, et les « progressive distillers » en ont sous le capot !

Caol Ila Distillers Edition et Caol Ila 18
: Certainement l’une des distilleries les plus prolifiques de l’île mais qui n’en oublie pas moins que quantité peut rester synonyme de qualité et ces deux références le confirment avec brio.

Ardbeg 10 et Ardbeg Uigeadail
: la version 10 ans est un magnifique monstre de tourbe comme on les aime, alors que Uigeadail vient délicieusement arrondir les angles grâce à son vieillissement partiel en ex-fût de Sherry (Xérès) pour créer une sublime dualité entre la tourbe et le fruit. Une main de fer dans un gant de velours !

Kilchoman Machir Bay et Kilchoman Sanaig :
la petite ferme-distillerie vous séduira à coup sûr avec ces deux références diablement bien faites.

- Laphroaig 10
 : référence iconique et d’un rapport qualité-prix probablement inégalable. Bref, une délicieuse bombe de tourbe qu’il vous faut impérativement connaître.
 
Kilchoman, fondée en 2005, faisait encore office de petite nouvelle sur l’île jusqu’à très récemment (elle est par ailleurs la seule distillerie de l’île située à l’intérieur des terres sans accès direct à la mer). C’est désormais au tour la distillerie de Ardnahoe, qui a vu le jour en 2019, propriété de l’embouteilleur indépendant Hunter Laing, de lui ravir ce titre de « jeune pousse ».

Un ambitieux projet a plus de 15 millions d’euros avec en son sein un magnifique centre d’accueil des visiteurs. Vous voyez certainement où on veut en venir ? Malgré son jeune âge, on vous encourage en effet à ne pas bouder la jeune et fringante distillerie lors de votre visite, rien que la vue panoramique depuis la salle des alambics en vaut clairement le détour !

Maintenant qu’on vous a bien mis l’eau (ou plutôt le whisky…) à la bouche, on vous laisse planifier tranquillement votre prochaine escapade en terre écossaise, et on espère que vous passerez faire un coucou aux alambics d’Islay de notre part. Pssst ! N’oubliez pas de faire un signe à chaque voiture que vous croiserez sur les routes de l’île, les locaux sont très accueillants, et espèrent que vous le soyez en retour !